La prévention de linceste, un travail avec SOS Inceste pour Revivre (Nantes) Rappel aux adultes de linterdit de linceste et de leur devoir de protection Notre organisme a été sollicité par SOS INCESTE Nantes pour les aider à faire de la prévention. Nous leur avons proposé un cadre, un rythme et un schéma de travail pour leur permettre de déterminer les quoi, où, comment ... de cette prévention. Travail que nous avons entrepris avec beaucoup de précautions sachant que SOS Inceste est une association de bénévoles ayant pour la plupart subi linceste, donc très susceptibles dêtre mis en difficulté personnelle dans cette démarche. Après un préalable théorique qui visait à être au clair sur notre champ dintervention, en loccurence linceste (et non maltraitance et abus sexuels dans leur ensemble), nous avons procédé à une étude critique des outils de prévention existants (Mon corps, cest mon corps, passeport, Jai peur du monsieur etc.) Il nous est apparu que le plus souvent, le problème dabus en famille nest pas évoqué, réservant les abus aux " étrangers ". La famille est présentée comme un secours sans faille : " En famille, on est bien, on me comprend ". Par ailleurs, la démarche de prévention des abus sexuels adoptée jusquici auprès des jeunes enfants nous parait avoir des défauts importants : - les images de famille idéale, souriante et unie, peuvent culpabiliser beaucoup denfants qui, sans être abusés ou maltraités, ny reconnaissent pas ce quils vivent. - pour les enfants non concernés, cest une introduction terrorisante à la sexualité - pour lenfant victime dinceste, ce discours lenferme dans la culpabilité et le sentiment que sa famille nest pas normale : il préférera plutôt penser que cest lui qui nest pas normal. Il semble donc que ces outils le bâillonnent, dun peu plus de culpabilité quils ne le libèrent. Les seuls travaux qui évoquent le risque dabus en famille sont essentiellement issus de lapproche québécoise : " Mon corps, cest mon corps ". Si cette démarche est intéressante, il nempêche que lon constate que la prévention consiste à demander à lenfant de reconnaître linterdit, puis davoir assez de courage et de force pour sopposer aux adultes. Or, il paraissait aberrant aux membres de SOS Inceste de mettre lenfant en situation de faire le rappel des interdits auprès des adultes : cest le monde à lenvers, disaient-ils ! On sappuie sur un pouvoir supposé des enfants alors que justement, sils sont abusés, cest quils nont pas de pouvoir ! Il nous est apparu quil y avait dans ces démarches envers les enfants une forme de pensée magique sur la prévention : - un enfant prévenu pourrait lutter seul contre 1 adulte abuseur + tous les adultes qui vont le traiter de fabulateur + tous ceux qui vont saffoler, douter etc
! | - la prévention aurait un effet réparateur : or, on prévient avant mais lorsque labus est consommé, il nest plus temps de prévenir, il faut intervenir ! Dernier point, rien nest dit dans ces outils sur laprès dénonciation publique. Nous savons pourtant que lenfant sera la cible de culpabilisation et de sanctions multiples, souvent toute sa vie durant alors quil na quune simple demande : que sa torture cesse. Ainsi, il nous a semblé que les messages de prévention actuels sont mensongers au moins par défaut- en présentant une société idyllique prête à entendre, soutenir et défendre
(comme la famille idéale). Or lenfant qui tente de se défendre va le plus souvent vérifier que la société nest pas prête à entendre sa plainte : ni police, ni justice, ni école, ni famille ! On pourrait aller jusquà dire quil est abusé par le discours de prévention qui dit " On taime, on te croit, on te soutient ! " alors que les faits et gestes vont lui faire penser que tout le monde aurait préféré quil se taise. Comment peut-il sen sortir et trouver une place intime et citoyenne stable et sécurisante ? En conséquence, loption de prévention adoptée par SOS INCESTE Nantes a été celle-ci : - révéler la souffrance spécifique de lenfant victime dinceste
: pour se délivrer, il doit mettre en cause dans son cur et dans sa tête une personne quil aime, à qui il doit souvent la vie, et quil ne pourra jamais renier ou oublier, malgré les lois, la prison, la distance et même la mort puisque la filiation biologique est un lien indestructible. - rappeler aux adultes le tabou de linceste et leur devoir de protection
. - informer les professionnels du sanitaire, éducatif et social
, pour les rendre à même de repérer des situations difficiles et dintervenir sans faire reposer sur lenfant le poids de la résistance à labuseur et de sa dénonciation. - informer sur le signalement :
- signaler nest pas juger (ce nest pas à celui qui signale denquêter ni dapporter des preuves = on demande aux autorités compétentes de procéder à des vérifications lorsquon a un doute sur une famille)
- signaler doit se faire dans la grande discrétion : quel que soit le résultat de lenquête, la famille et chacun des individus concernés a droit au respect de sa vie privée et nul na besoin des commentaires, rumeurs et ragots qui le poursuivront bien longtemps au-delà des faits.
- signaler est toujours grave, difficile, délicat et parfois risqué: il faut lassumer ainsi.
La forme choisie est celle de réunions que nous avons appelé " Information Active " où nous invitons le réseau associatif, les professionnels de la santé et du social, de léducatif, les professionnels police, justice, les parents délèves. Ces séances sadressent aux adultes que nous invitons, via des sketeches et un débat, à assumer leur devoir de protection des enfants. Un des premiers résultats concret est la demande que cette séance soit intégrée à la formation continue des médecins Aussi, au-delà dune réponse locale et limitée, METANOYA souhaiterait que lidée de " rappel aux adultes de linterdit de linceste et de leur devoir de protection " soit reprise et partagée avec dautres. Nous sommes donc ouverts à tout contact à ce propos. Les heureux co-animateurs de ce travail ! Merci mille fois à léquipe de SOS !! Martine COSTES et Eric PELSY |
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